« Au japon, les embryons avortés s’appellent mizuko, les enfants de l’eau. Leur protecteur est Jizô vénéré dès la XIIIème siècle et toujours représenté comme un simple moine bouddhiste. Les mères vont au temple offrir à Jizô des ex voto en souvenir de leurs enfants morts avant de naître, qui attendent pour pouvoir traverser la rivière des Enfers ».
Nancy Huston Badgirl Ed. Actes Sud
Petits bouts de fils restant des broderies dans mes « matrices » verreries (en gestation) de chimie-laboratoire sur mon bureau. Je ne peux vous jeter.
Des essais, des réussites, des « œuvres » … en tous cas des créations ont émergé de mes mains dans le tissu. Elles ont été vues, regardées, exposées, comprises ou non, désirées et parfois acquises par d’autres. Par la magie de la transformation artistique les fils sont devenus messages, symboles, images et surtout l’expression de ma pensée, de mes recherches, de ma sensibilité…
Et vous ? petits rebus ... Vous n’avez pas eu la chance d’être là au bon moment et de participer à la merveille de la transformation. Vous êtes là, dans cette poubelle de table en attente.
En attente de quoi ?
Ils ne sont pas sortis de mon esprit tous ces petits embryons, fœtus qui pour n’ont pu devenir des êtres par la magie de la vie. Et par cette pensée que vous « auriez pu être œuvre », je trace ce parallèle entre bouts de fils et bouts d’humains.
A présent, il s’agit pour moi de rendre ainsi hommage par l’élaboration de ces « enfants de l’eau » ces « mizuko » sortes d’ex voto de fils dérisoires et de cire à tous ces enfants non nés qui existent dans l’esprit et la chair de toute femme (réels ou imaginaires).